mercredi 12 janvier 2011

Disponibilité des informations concernant le macrozonage de Port-au-Prince

Source: Jean-Marie Arnoux, ing, 12 janvier 2011

Port-au-Prince, ce 12 janvier 2011

Objet: Disponibilité des informations concernant le macrozonage de Port-au-Prince

Chers collègues,

Par coïncidence, la version finale des cartes de macrozonage sismique de la région métropolitaine réalisées par l'équipe du Pr. Rathje avec le Laboratoire National du Bâtiment et des Travaux Publics et le Bureau des Mines et de l'Energie, est disponible ce 12 janvier, date anniversaire de la terrible tragédie de l'an passé.

Les résultats sont temporairement hébergés sur le site suivant :
http://web.ics.purdue.edu/~ecalais/haiti/macrozonation/

Ils sont en voie d'être transférés vers les sites du LNBTP, BME et CNIGS.

Les données et résultats issus de cette étude sont ouvertes sans restriction au secteur public et privé sous un format électronique géoréférencé (SIG). Les deux produits principaux, qui permettent d'ores et déjà le calcul de spectres de réponse pour le dimensionnement d'ouvrage, sont:

- la carte des classes de sols (compatibles avec les normes IBC et Eurocode 8) réalisée à partir de mesures Vs30 et de l'interprétation d'observations géologiques et géotechniques.

- les cartes d'aléa sismique (USGS Open File Report 2010-1067), qui donnent la probabilité d'excédence de l'accélération du sol au rocher (PGA, 1 Hz, 5 Hz).

Le jeu de données contient aussi:
- la carte géologique de Port-au-Prince;
- l'ensemble des mesures Vs30 réalisées;
- la topographie de détail tirée de la mission Lidar du printemps 2010 financée par la Banque Mondiale;
- l'inventaire des dégâts de l'UNOSAT.

Ces produits sont manipulables par la plupart des logiciels SIG (Arcinfo, Mapinfo, etc...). Les cartes associées sont aussi disponibles au format pdf, pour une visualisation plus directe.

Ces produits ne remplacent pas le microzonage sismique qui reste à faire pour Port-au-Prince et les principales zones urbaines du pays. Elles ne se substituent pas non plus à des études géotechniques locales qui peuvent s'avérer nécessaires, en particulier pour l'implantation de structures à fort enjeu (par exemple bâtiments publics, hôpitaux, écoles, etc.). Enfin, un code de construction avec des normes parasismiques reste à développer et mettre en application formelle en Haiti.

Cependant, l'utilisation de ces produits, de concert avec l'utilisation de codes de construction existants tels que ceux préconisés par le Ministère des Travaux Publics (IBC, Eurocode 8, ASCE, CNBC) permet d'ores et déjà de prendre en compte les principaux éléments pour construire et planifier de manière adaptée compte tenu de la menace sismique dans la région métropolitaine.

Bien à vous,

Yves-Fritz Joseph, Directeur Général du LNBTP
Dieuseul Anglade, Directeur Général du BME
Eric Calais, Conseiller Scientifique au PNUD Haiti

Si peu...

Par Agnès Gruda
La Presse
Source: cyberpresse.ca, Publié le 12 janvier 2011 à 06h36

Six mois après le tsunami qui a dévasté l'Indonésie en décembre 2004, l'organisation humanitaire Architectes de l'urgence avait déjà construit des dizaines de maisons. Au premier anniversaire, près de 200 maisons et une poignée d'écoles étaient prêtes.
Un an après le tremblement de terre en Haïti, cette ONG n'a rien bâti du tout. Elle n'est pas inactive pour autant et s'occupe de restaurer des écoles et des habitations dans quelques quartiers de Port-au-Prince. Mais des maisons neuves? Aucune.

Pourquoi? Parce que l'argent n'est pas au rendez-vous, se désole le président de l'organisme, Patrick Coulombel.

Son organisation ne représente qu'une petite goutte dans l'océan d'ONG qui a déferlé sur Haïti depuis le 12 janvier 2010. Mais son exemple n'en est pas moins révélateur. Les Architectes de l'urgence s'attendaient à recevoir une dizaine de millions de dollars pour contribuer à la reconstruction d'Haïti. Ils n'ont reçu qu'un tiers de cette somme, entièrement destiné à la restauration et à la construction d'abris temporaires. «Pour bâtir des logements neufs, nous n'avons rien. Zéro.»

La comparaison entre le tsunami et le séisme haïtien a des limites, reconnaît Patrick Coulombel. Le premier a dévasté des régions rurales, peu habitées, alors que le second a frappé des villes surpeuplées dépourvues de registres fonciers. Construire à neuf sur du chaos, ce n'est pas évident.

Un exemple: le Centre d'étude et de coopération internationale espère bâtir des maisons à partir de gravats recyclés à Léogâne, la ville la plus dévastée par le séisme. Les titres fonciers y sont un fouillis inextricable. «C'est comme un tunnel sombre et sans fin», dit Carine Guidicelli, porte-parole du CECI. Bref, le projet est en suspens.

Mais aux yeux de Patrick Coulombel, la raison fondamentale du retard que l'on met à reconstruire Haïti est ailleurs: dans le choix politique de la communauté internationale, qui a insisté pour que les Haïtiens aillent voter et qui attend qu'un nouveau gouvernement se mette en place avant de se lancer vraiment dans la reconstruction. Entre-temps, des millions de dollars attendent d'être dépensés...

Patrick Coulombel est furieux: «Attendre les élections pour commencer la reconstruction, c'est scandaleux! Pendant ce temps, les gens croupissent dans des tentes.»

Il y a aussi les atermoiements des autorités haïtiennes, qui n'ont toujours pas publié le nouveau Code du bâtiment. Récemment, le ministère des Travaux publics a annoncé que les normes de restauration des anciens bâtiments seraient publiées... après les élections. Pour les constructions neuves, on n'en sait rien.

Les architectes pourraient toujours s'inspirer des normes qui existent dans les pays exposés à des cataclysmes semblables à ceux qui s'acharnent sur Haïti. «L'ennui, c'est que, tant que la construction n'est pas encadrée, les bailleurs de fonds internationaux refusent de nous financer», dit l'architecte en colère...

Pourtant, la Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti, coprésidée par Bill Clinton, a été mise sur pied pour canaliser tous les efforts de reconstruction et les soustraire aux aléas de la petite politique. Lieu de toutes les lenteurs, cette commission a annoncé ses tout premiers projets seulement en décembre. Ne pouvait-elle donc pas aider les Haïtiens à produire en priorité un nouveau Code du bâtiment?

Bilan: un an après le tremblement de terre, les Haïtiens sont toujours en mode survie. Ce retard s'explique, en partie. Mais il est aussi, en grande partie, inexcusable.

dimanche 9 janvier 2011

Palais des ministères : le mépris de l'histoire

Par Robenson Geffrard
rgeffrard@lenouvelliste.com


Source: lenouvelliste.com, 7 janvier 2011

Il est à moins de 100 mètres du Palais national et à un jet de pierre de la base du Corps d'intervention de maintien de l'ordre (CIMO), au Champs de Mars. Pourtant, il a été pillé et incendié à maintes reprises. Alors qu'il est considéré comme patrimoine historique par l'Institut de Sauvegarde du Patrimoine national (ISPAN), le Palais des Ministères, sévèrement endommagé par le séisme a été vandalisé et abandonné. Une autre page de l'histoire d'Haïti souillée et délaissée.

Haïti: Vendredi 7 janvier 2010, 10 h 35 du matin. A moins de 5 jours de la première commémoration du tremblement de terre dévastateur du 12 janvier dernier, des individus pillaient encore le Palais des Ministères en plein jour, au vu des autorités. Briques, fer, tôles, câbles électriques...les pillards ne laissent rien. Tout ce qui a une valeur marchande, le peu qu'il soit, a été emporté. Ils sont deux jeunes garçons, le visage à peine camouflé, qui calmement opèrent en toute quiétude. Avec leur masse, ils essaient de récupérer du fer et des briques sur les ruines du ministère des Finances. Visiblement, ils ne craignent rien, malgré la présence de plusieurs agents de sécurité.

Un an après le tremblement de terre du 12 janvier, les autorités n'ont pratiquement rien fait pour empêcher ce genre de pillage. « Tous les ministères du bâtiment ont été pillés par des individus. Il y a un mois de cela, ils ont mis le feu dans la partie réservée au ministère des Finances, explique Charles Desrameaux, un contractuel des Travaux publics chargé de surveiller le site des TPTC. Aujourd'hui encore, ils continuent à voler le peu qui reste du Palais des ministères. »

Après avoir presque tout emporté au lendemain du séisme, depuis quelque temps, les pillards s'attaquent directement à la construction, se désole le très célèbre Ti Charles fidèle gardien perpétuel des TPTC. « J'ai tout vu. Ils ont tout pris: portes, fenêtres, bureaux, matériels de bureaux... Tout ce qu'ils pouvaient revendre ou utiliser chez eux a été emporté », explique-t-il.

Comment se fait-il qu'à deux doigts du Palais national et de la base du CIMO, les individus pillent et incendient et ce vaste bâtiment ? « Je ne sais pas. Comme toi et moi, les autorités du pays ne font que constater les dégâts, a-t-il répondu. Les scènes de pillage ont commencé au lendemain même du séisme. Tout le monde est au courant, a-t-il ajouté. »

Par ailleurs, les agents de sécurité qui surveillent le site du ministère des Finances ont peur d'intervenir afin empêcher les pillards de commettre leurs forfaits. « Ils sont toujours dans les environs, ils connaissent notre nom et notre visage. Ce sont des bandits, ils peuvent tout faire. Les autorités sont au courant de la situation. Nous leur avons déjà envoyé plusieurs rapports sans réponse. Qu'est-ce qu'on peut bien faire ?», racontent-ils.

« Maintenant, avec votre présence ici, nous espérons que les autorités vont comprendre ce qui se passe sur le site. Nous espérons aussi qu'ils vont prendre les mesures appropriées », ont-ils renchéri.

Prendre des mesures appropriées un après la catastrophe. Pour quoi faire, puisqu'il ne reste pratiquement rien du Palais des Ministères sinon des briques que les pillards s'acharnent à enlever les unes après les autres.

Le Palais des Ministères n'est que l'ombre de lui-même. Certains sites des ministères logeant dans le bâtiment ont été totalement déblayés, comme c'est le cas pour les Travaux publics Transport et Communications, celui de la Santé et de la Population et le ministère de l'Intérieur et des Collectivités Territoriales. Les clôtures en tôle de l'ISPAN n'ont pas pu empêcher l'irruption des pillards.

Selon des sinistrés à la place de la Patrie au Champ de Mars, non loin du Palais des Ministères, les pillards n'ont pas eu à s'inquiéter. De jour comme de nuit ils opéraient. « Personne n'a empêché à ces individus de piller ce patrimoine national des équipements aux archives. Sans contrainte, ils ont emporté des matériels et mis le feu au bâtiment », s'insurge un jeune homme installé à ce centre d'hébergement après la catastrophe.

Le Palais des ministères qui logeait 5 ministères fait partie des quatre palais du pays qui ont été détruits par le tremblement de terre du 12 janvier dernier. Il s'agit du Palais national, du Palais de justice et du Palais législatif.

Pour son architecture grandiose et sa beauté, l'Etat Haïtien avait jadis l'habitude d'utiliser la photo du Palais des Ministères sur les cartes postales. Aujourd'hui, cette page d'histoire est méprisée, vandalisée et incendiée.

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